Remédier à la situation de crise -que connait le logement en France- va nécessiter des réponses rapides et puissantes.
Les solutions proposées très récemment par les pouvoirs publics pour dégripper le marché font débat. Parmi les dernières en date, celles annoncées par le ministre de la Transition écologique concernant le financement des projets d’acquisition des particuliers suscitent des vives réactions.
Pour redonner du pouvoir d’achat immobilier aux ménages, le ministre a évoqué de « nouveaux dispositifs de financement, comme les prêts in fine ou hypothécaires, comme cela existe déjà dans certains pays voisins». Des discussions sur le sujet sont en cours entre les fédérations de professionnels de l’immobilier, les banques et le ministère qui doivent se rencontrer pour en parler.
La formule de prêts évoqués par le ministre s’appuie sur un modèle helvétique de crédit hybride sur 20 ou 25 ans, dans lequel seule une partie du montant emprunté, de 20 % ou 30 %, est remboursée in fine. Les 70 % ou 80 % restants sont couverts par un prêt amortissable classique.
1 - Quelles sont les particularités d’un prêt in fine?
Il fonctionne différemment du prêt amortissable, qui est le prêt le plus utilisé en France, dont chaque mensualité payée rembourse une partie des intérêts du prêt, de l’assurance et d’une partie du capital emprunté. Chaque mois, le capital restant dû diminue.
Dans le cas d’un prêt in fine, les mensualités ne visent qu’à rembourser que les intérêts et l’assurance du prêt, à échéances constantes, et pas le capital. Le capital sera remboursé intégralement, en une seule fois, à l’échéance du crédit.
Pour obtenir ce prêt, l’emprunteur doit fournir -en général- au moins 30 % de la somme à emprunter en apport. En outre, la banque prêteuse demande que cette somme soit bloquée sur un placement, souvent une assurance-vie. L’épargne y sera placée pendant toute la durée de l’emprunt. Celle-ci permettra, en prenant en compte le rendement, de disposer d’un montant suffisant au moment du remboursement. Sinon, l’emprunteur doit ajouter chaque mois l’argent nécessaire pour atteindre cette somme à la fin du prêt.
Le prêt in fine est aussi plus coûteux que le prêt classique. Contrairement à un crédit amortissable, dont les intérêts ne sont calculés que sur le capital restant dû qui diminue de mois en mois, le capital à rembourser est constant tout au long du crédit.
Quant au prêt hypothécaire, il s’agit d’une autre variante de crédit immobilier adossé à une hypothèque. Cette dernière est une garantie du prêt qui permet à la banque de saisir le logement en cas de défaillance de remboursement et si aucune solution amiable n’a été trouvée.
2 - Qui est concerné par ces deux prêts?
Si le prêt classique amortissable à taux fixe s’adresse en principe à tous types d’emprunteurs, le prêt in fine cible les emprunteurs aisés et certaines opérations patrimoniales spécifiques.
Le prêt in fine est intéressant pour les investisseurs locatifs qui veulent réduire leurs revenus fonciers. Les intérêts d’emprunt sont déductibles en totalité des revenus fonciers, sous réserve d’opter pour le régime d’imposition au réel. L’économie d’impôt est d’autant plus significative que le contribuable est soumis à un taux marginal d’imposition élevé.
Concernant le prêt hypothécaire, les souscripteurs visés par les banques sont ceux qui souhaitent acheter un bien à l’étranger et les emprunteurs seniors. Dans le premier cas, l’établissement, qui ne peut pas prendre de garantie sur le logement à l’étranger, prend une hypothèque sur le patrimoine immobilier détenu en France. Dans le second, c’est une façon pour la banque de réduire son risque, eu égard à l’âge de l’emprunteur.
3. Le prêt in fine, une bonne idée ?
Sur le papier, le prêt in fine pourrait ainsi plus facilement rentrer dans le cadre du taux d’endettement plafonné à 35% des revenus nets, défini par le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF). Ceci étant, nous partageons l’avis des professionnels de l’immobilier qui le considèrent comme non adapté à l’acquisition d’une résidence principale.
Ce prêt coûte plus cher et il est vu comme plus risqué pour la banque. En cas d’imprévus dans la vie de l’emprunteur ou de baisse des prix immobiliers, il lui sera plus difficile de recouvrer la somme prêtée.
De plus, en cas de prêts mixtes (amortissables + in fine), cela soulève quelques points techniques. Notamment sur la prise de garantie hypothécaire de la part des banques sur les 20 % in fine qui va être compliquée à évaluer. Quelle sera la valeur réelle de cette part à l’échéance du prêt ? Que se passe-t-il si l’emprunteur décède, en cas de succession ? Peut-on transmettre le prêt ou est-on obligé de vendre les 20 % ?
En conclusion, le recours à un prêt in fine ne parait pas être la solution plus adaptée pour l’acquisition d’une résidence principale.
Un assouplissement des critères du HCSF en redonnant aux banques le pouvoir d’analyse du risque accordé serait plus probablement un vrai début de solution!
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